
Les jardins de Persépolis et l'origine du Paradis chrétien
Un beau jour de juillet à Pasargades dans le Fars. La chaleur est écrasante, la plaine déserte. Seul l’imposant tombeau de Cyrus le Grand offre un peu d’ombre au voyageur. On peine à s’imaginer sous le sable et les arbustes rachitiques le luxuriant jardin royal qui fut probablement à l’origine du phénomène des paradis persans, construit au VIème siècle avant notre ère. Ne demeurent que les canalisations en pierre, qui dessinent de grands rectangles dans la poussière. Pasargades, c’est la ville-mère de Persépolis, la toute première capitale de l’Empire Achéménide. Elle a rapidement été abandonnée en faveur de cette seconde, construite par Darius I quelques décennies après seulement une quarantaine de kilomètres au sud-ouest. Là-bas, le phénomène prend de l’ampleur. Cette fois, c’est toute la plaine qui est transformée en jardin, parsemée de demeures et de routes.

En langue avestique (langue proche du vieux perse qui était utilisée dans les écrits de la religion zoroastrienne, l’une des plus anciennes religions dont des écrits nous soient parvenus et qui était vraisemblablement celle des rois Achéménides), ces jardins étaient désignés sous le terme de pairi-daeza, « espace clos ». Un lieu de repos, de fraîcheur, de fertilité et de retraite spirituelle au milieu de la rigueur implacable du désert. Si c’est bien ce même mot qui est passé dans la culture judéo-chrétienne, mentionné à plusieurs reprises dans l’Ancien Testament avec la signification que nous lui connaissons, il n’est pas impossible que le concept même du « jardin d’Eden » doivent être attribué à la culture persane.
Cette longue tradition du jardin persan a survécu jusqu’à aujourd’hui. Même l’envahisseur mongole ne s’est pas senti le cœur à annihiler ces délicats paradis, qu’il a fini par propager loin à l’est. À l’ouest, c’est la culture islamique qui en est devenue le vecteur loin à la ronde. De magnifique exemples perdurent en Iran, comme Bagh-e Finn à Kashan, Chehel Sotoun à Ispahan, ou Bagh-e Eram et Narenjestan à Shiraz, toutes d’anciennes demeures de souverains ou de riches marchands livrées aux flâneurs endimanchés en quête de fraîcheur. Mais le plus célèbre reste celui… du Taj Mahal en Inde !